J'ai beau analyser le sujet sous tous les angles, je ne saisis pas cet élan de négation politique qui anime la majorité du peuple français.
Le Non au référendum sur le traité de constitution européenne m'avait laissé fort perplexe, car elle aurait permis de jeter enfin les bases tant espérées d'une véritable Europe Politique, dotée notamment d'une voix unique en matière de politique étrangère. Elle était imparfaite, soit, mais elle était bien mieux que... rien du tout.
Imparfaite, la mouture du CPE (Contrat Première Embauche) l'était probablement. Certes, cette nouvelle forme de contrat effraie par la précarité qu'elle pourrait charrier, semble remettre en cause certains acquis sociaux et confère aux employeurs le pouvoir discrétionnaire de licencier à tout moment une personne en longue période d'essai sans avoir à se justifier.
Cela vallait-il la peine pour autant de laisser éclore un ersatz de mai 68? Bien triste image de la France. Car qu'a-ton vu?
D'un côté, un Premier Ministre intransigeant qui campe sur ses positions en restant sourd aux injonctions d'un peuple écoeuré de la chose publique. Il ne faut pourtant pas oublier, comme le dit l'adage, que l'on mérite nos dirigeants, qui plus est dans un système démocratique.
De l'autre, une surenchère médiatique insensée qui a gardé ses projecteurs figés sur le CPE, s'oubliant à tergiverser des semaines durant sur ce contrat sans voir l'essentiel.
Oui, car l'essentiel est malheureusement passé inaperçu.
Vendredi dernier le Président de la République, Jacques Chirac, a promulgué la loi pour l'égalité des chances. Celle-ci comporte 51 articles, et seul un article, un seul, le huitème, est consacré au contrat première embauche.
Dans ce tohu-bohu honteux, les voix n'ont cessé, à gauche mais aussi à droite, de s'élever contre la promulgation ce cette loi. Mais s'est-on un tant soit peu penché soit sur les dispositions relatives à la lutte contre les discriminations (Art. 38) et notamment le renforcement des pouvoirs de la Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations (Art. 41)? Ou sur la création de l'Agence pour la cohésion sociale (Art. 39), le contrat de responsabilité parentale (Art. 48), la lutte contre les incivilités (Art. 50 & 51)? Ou encore sur l'apprentissage, les zones d'éducation prioritaire, la formation, les régime fiscal des zones franches urbaines (toute la Section 3)? Non rien de tout cela, les media ont juste réussi à focaliser l'attention sur trois petites lettres.
Le fin mot de l'histoire est que la loi a été promulguée, que l'article 8 sera corrigé, mais que l'image de la France à l'étranger a été une nouvelle fois tristement ternie.
En somme, beaucoup de bruit pour rien.
Presque rien.
Car tout de même de Villepin voit sa popularité massacrée, Chirac sa fin de règne pitoyable, le nettoyeur au Karsher en ressort grandi, et la gauche n'a même pas su en profiter pour resserer ses rangs afin de s'assurer d'éviter le spectre d'un nouveau 21 avril.
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Photo Rémy Artiges
Bonjour Amine
Je vais respecter l’esprit de ton billet , je vais pas entrer dans le débat pour/contre le CPE et les arguments qui vont avec.
A mon sens il ne s’agit ni d’une peur d’avenir ni d’un refus des réformes. Il s’agit avant tout de la contestation des méthodes détestables d’un pouvoir de plus en plus arrogant . Le problème du fond c’est qu’en France la droite a tous les pouvoirs (Présidence de la république, AN, Sénat, conseil constitutionnel,….) du coup les citoyens détournent chaque consultation ou chaque débat pour crier leur désarroi faute de pouvoir le faire via les corps constitués.
T’as raison de souligner que la loi pour l'égalité des chances ne contient pas uniquement l’article huit tant contesté. Encore faut il expliquer que fait cet article (établissant la précarité pour les moins de 26 ans) dans cette loi et c’est quoi son lien avec l’égalité des chances ? Et il faut aussi expliquer pourquoi le premier ministre a tenu à passer en force en utilisant le 49-3. et pourquoi une réforme concernant le code du travail n’a pas fait objet d’une consultation de partenaires sociaux comme c’est l’usage……
Y a pas si longtemps il y avait la réforme très contestée des retraites. Pourtant elle est passé cette réforme parce que le premier ministre de l’époque n’a pas fait fi du débat parlementaire et ne s’est pas réfugié derrière le 49-3.
Tout est dans la méthode.
Je partage bien entendu les conclusions du dernier paragraphe de ton billet. Manifs ou pas, la France se « droitise » de jour en jour . Triste ambiance de fin de règne.
At 4/03/2006 12:35:00 PM, Amine
Larbi> Je suis d'accord avec toi, les méthodes sont totalement contestables (49-3 en particulier).
Mais comme je l'indiquais, "on a les gouvernants que l'on mérite".
Ce sont principalement les électeurs de gauche et du centre qui sont aujourd'hui ulcérés par cette situation, n'est-ce pas? Ils n'avaient qu'à ne pas jouer puérilement avec les urnes le 21 avril 2002 en ne diluant pas leurs choix dans des votes de contestation.
Ils ont ainsi remis la chiraquie au pouvoir, n'ont donc qu'a faire contre mauvaise fortune bon coeur et attendre 2007 voir peut-être les choses changer un petit peu.
Et pas au Karcher j'espère.
Quel triste sort que celui de Chirac. Il est en train de connaître une fin de règne à la de Gaulle. Les français ont toujours été rtès hostiles aux réformes. C'est sûrement un héritage historique de 1789... Mais les réformes, ne sont-elles pas au bout du compte, faites pour être impopulaires? Pour changer un mode de vie?
I am Sorry mais je ne vais pas parler de la CPE
Juste pour te signaler que dans ta liste de liens, dans la catégorie journaux il manque celui de jeune Afrique et celui d'Afrique Magazine
Et dans la liste de Blog, il manque...le mien!!!
Mais moi je suis tunisienne et non marocaine
Sinon, je tiens a dire que j'ai adoré ta play liste
il y beaucoup de vrai dans ton analyse quoique j'achoppe tout de même un peu sur "...cet élan de négation politique..." et "...mais que l'image de la France à l'étranger a été une nouvelle fois tristement ternie.
En somme, beaucoup de bruit pour rien.
..."
vu d'outre méditerrané,en dehors de leur victoire même, cela fait plaisir de constater qu'il y a encore, dans ce pays, une jeunesse qui sait agir politiquement et faire prévaloir ses revendications légitimes sur le "mouvement actuel de l'histoire".